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Miami, une ville en pleine transformation

Le Figaro Magazine – Edition 24 Février 2017

Miami est prisée des Sud-Américains et des Européens qui investissent dans la pierre.
Et les Asiatiques prennent maintenant pied dans le nouveau quartier de Brickell.

Si vous pensez que Miami est uniquement une ville de retraités, où les Américains des Etats du Nord fuient le froid pour venir réchauffer leurs vieux os (les «snowbirds»), allez faire un tour dans la capitale de la Floride. Le climat n’a pas changé, mais les retraités sont loin d’être les seuls à en profiter. Certains gestionnaires de hedge funds quittent aussi New York et s’installent en Floride, attirés par une fiscalité douce comme certains professionnels du cinéma. South Beach, le quartier Art déco de la ville, est toujours là avec ses couleurs pastel et son ambiance à part, un passage obligé pour les touristes.

Sur Venetian Islands, une île à deux pas du quartier qui a fait la réputation de Miami, Gary Lazarus, agent immobilier chez Fortune, fait visiter une maison de rêve. De celles que l’on peut retrouver dans les émissions de reality show des chaînes françaises qui emmènent des bandes de jeunes gens bruyants tutoyer la version la plus bling-bling du rêve américain. Et qui peut se louer 300.000 dollars pour un mois. Avec ses lignes épurées, sa piscine sur le toit (une rareté à Miami Beach), son ponton sur la baie et sa vue sur la skyline de Miami, elle est mise en vente plus de 14 millions de dollars. Mais Miami a bien d’autres facettes.

La ville de demain

Un nouveau quartier, Brickell, est ainsi en pleine mue. Facilement accessible depuis l’aéroport et desservi par le Metromover, une des rares lignes de transport ferroviaire de la ville, il ressemble plus à Manhattan qu’à So Beach. En plein cœur de l’ancien financial district (quartier financier) de la ville, qui s’anime désormais à la nuit tombée, Swire Properties, filiale du groupe de Hongkong Swire Pacific Holdings, vient d’ouvrir un nouveau centre commercial de 50 000 m², le Brickell City Centre, avec des enseignes de luxe et des restaurants. Et, en prime, une technologie innovante pour rafraîchir les clients du centre commercial grâce à un «ruban» de 15.000 km² qui surplombe les lieux et qui a coûté à lui seul la bagatelle de 30 millions de dollars. «Ce ruban d’acier, de tissu et de verre protège les visiteurs, capte les vents marins pour réguler l’air et la température et récupère l’eau de pluie ; il permet aux visiteurs de circuler à l’air libre avec une lumière naturelle», précise Swire. Le budget total de ce développement immobilier, qui doit créer 3 700 emplois directs et 2 500 indirects, dépasse le milliard de dollars. C’est le premier aux Etats-Unis à cette échelle pour le groupe qui en a mené de similaires en Asie.

Ce programme mixte de près de 4 hectares en pleine ville comprend aussi l’hôtel design East, deux tours de bureaux et deux tours résidentielles de 43 étages dessinées par Arquitectonica (la première est vendue en quasi-totalité) avec des services à l’américaine (salle de jeu pour jeunes enfants, bibliothèque, spa). Pour habiter là, il faut compter au moins 2,1 millions de dollars pour un penthouse de 268 m² et 755 000 dollars pour un logement d’une centaine de mètres carrés «Cela reste bien moins cher qu’à New York», explique Edgardo Defortuna, le président du développeur Fortune International Group qui commercialise le programme et dont Savills est le partenaire pour les acheteurs européens.

Les investisseurs qui misent sur Brickell parient sur le développement du quartier d’affaires de la ville et la location en résidence principale et non à des touristes. «Beaucoup d’entreprises sud-américaines ont leur siège à Miami» note le président de Barnes. A une encablure de Cuba, Miami est la porte d’entrée des Sud-Américains aux Etats-Unis. L’élargissement du canal du Panama devrait avoir un impact positif sur l’activité portuaire. De nombreux promoteurs sud-américains construisent la ville de demain. Beaucoup d’investisseurs viennent aussi de cette partie du monde. «Ils achètent ici parce qu’ils se sentent en sécurité alors que, chez eux, ils ont peur d’être enlevés», explique un agent immobilier. Et, comme partout, l’immobilier de luxe reste une valeur refuge qui permet d’investir dans une autre devise et un actif réel. «Cela reste un choix émotionnel: vous ne pouvez pas vivre dans votre portefeuille d’actions» remarque aussi Frederick Peters, le président du réseau immobilier new-yorkais Warburg, nouveau partenaire de Barnes.

Un marché actif

Les prix ont toutefois beaucoup monté à Miami ces dernières années. Est-on en haut de cycle? Une question à se poser, d’autant que l’immobilier est bien plus cyclique aux Etats-Unis qu’en France. Aux pires heures de la dernière crise immobilière, les prix avaient chuté de 50% à Miami avant de rebondir encore plus haut. Aujourd’hui, à New York comme à Miami, l’offre de nouvelles constructions, souvent luxueuses, est importante. «C’est un marché d’acheteurs», reconnaît Thibault de Saint-Vincent. Les acheteurs négocient les prix et jouent la montre si les vendeurs ne sont pas conciliants. Certains promoteurs ont déjà revu à la baisse quelques prix. Ainsi, les résidences de W South Beach, qui profitent des services de l’hôtel, ont vu leurs prix passer de 2,15 à 1,99 million de dollars. «Le marché reste très actif, il faut un à trois ans pour vendre un immeuble, ce qui est normal», explique-t-on chez Fortune. Même sentiment chez Sotheby’s International Realty, qui a par exemple vendu une maison de 220 m² avec quatre chambres à Miami Shores 715 000 dollars louée en dix jours 4 750 dollars par mois.

Alors que Donald Trump a boosté la Bourse, qu’en sera-t-il pour l’immobilier? «Les Américains attendent de voir ce que le Président va faire et va changer avant de prendre des décisions immobilières. La clientèle française est toujours là et les Russes reviennent». Si Donald Trump mène à bien son programme de baisses d’impôts, cela devrait jouer en faveur de l’immobilier, même si le dollar fort peut peser sur la demande étrangère et si la hausse des taux d’intérêt peut être un frein.

L’effervescence immobilière ne se limite pas à Miami stricto sensu et certains investisseurs préfèrent s’éloigner de quelques dizaines de kilomètres pour trouver des prix plus abordables et une ambiance familiale. Au nord, Sunny Isles, autrefois prisé surtout par les Russes, est en train de s’internationaliser. Et les projets de tours face à l’Océan se font concurrence. Celle du Ritz-Carlton (52 étages) offre aux acheteurs l’assurance de pouvoir bénéficier du service hôtelier de la chaîne et notamment d’un lounge, d’un club, et d’un restaurant au 33e étage. Deux penthouses ont été vendus 16 et 21 millions de dollars. Livraison prévue en 2018. A deux pas de la Porsche Tower, où il est possible de faire grimper sa chère automobile jusqu’à un garage à l’étage de son appartement, fût-ce au 20e, les promoteurs se font concurrence dans un marché qui ralentit. Avec, pour convaincre les acheteurs, des bureaux de vente qui laisseraient pantois les Européens: commerciales de choc, films glamour et maquettes animées à l’appui. Vue plongeante sur l’Atlantique, lignes géométriques et ouvertures XXL sur l’extérieur, toute en transparence, la tour Jade Signature (bibliothèque commune sur notre photo) est un modèle du genre.

Devenue le terrain de jeu de nombreux promoteurs, Miami est une ville en pleine transformation. Pour les investisseurs, elle n’est plus uniquement une destination d’immobilier de vacances, mais aussi une ville de placement plus classique. Il faut tout de même se faire bien accompagner si on souhaite investir outre-Atlantique: par un opérateur qui maîtrise les données fiscales et qui ait une expérience suffisante du marché local.

Source : Immobilier.LeFigaro.fr